La marche pèlerine au Québec en 2018

"Guide chemins de pèlerinage du monde" de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France, chapitre Amérique.
« Guide chemins de pèlerinage du monde » de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France, chapitre Amérique. Photo de Carole Longuépée sur l’un des chemins québécois (Sentiers entre Vents et Marées, Îles de la Madeleine).

Nous avions présenté sur ce site l’ouvrage de Michel O’Neill paru en janvier 2017 aux Presses de l’Université Laval, à Québec sous le titre : « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré – La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 ». Le professeur émérite et chercheur autonome membre de la Chaire Jeunes et religions de la Faculté de théologie et des sciences religieuses de l’université Laval de la ville de Québec dresse « l’état de la marche pèlerine au Québec en 2018 ». Nous vous présentons dans cet article les faits marquants soulignés par ce document de 62 pages et vous invitons à lire l’intégralité du document proposé en libre accès.

La marche pèlerine au Québec en 2018 en chiffres

  • Environ 3600 personnes du Québec ont marché sur les Chemins de St-Jacques en Europe (+ 8,96% par rapport à 2017)
  • 1941 personnes ont marché sur les chemins du Québec (1650 en 2017, soit +17,4% en un an, et +42% par rapport à 2016)
  • 67,6% sont des femmes
  • Nombre de chemins québécois : 30 (24 opérationnels, 3 en latence et 3 en développement)
  • Longueur des 30 chemins québécois : inférieure à 200 km (15) ; entre 200 et 800 km (11) ; plus de 800 (4). Elle varie entre 67 et 1870 km, avec une moyenne de 322,6 km.
  • La fragilité de la marche pèlerine québécoise demeure réelle, à cause de la difficulté à trouver des hébergements ou l’essoufflement des bénévoles. S’y ajoute le fait que 12 chemins sur 30 ne reposent sur les épaules que d’une ou deux personnes. C’est ainsi que l’un des premiers chemins créé au Québec, Le chemin des Navigateurs, mettra les clés sous la porte à l’issue de sa douzième saison en 2019, faute de relève.
  • Tendance vers une diversification des lieux de marche pèlerine (voie du Piémont-Pyrénéen (France), Via de la Plata (Espagne), Via Francigena (Italie), pèlerinage de Shikoku (Japon), Jeju Olle (Corée)…)
Association Du Québec à Compostelle
Capture d’écran du site internet de l’Association Du Québec à Compostelle

12 nouveaux chemins de marche pèlerine au Québec identifiés en 2017-2018

La marche pèlerine au Québec est en constante évolution. Au 31 décembre 2018, Michel O’Neill avait « repéré 24 chemins qui avaient été en opération durant l’année, trois en latence, et trois en développement, pour un total de 30 ». Dans son premier ouvrage paru en janvier 2017, il en recensait 18. Et dans le Guide des chemins de pèlerinage du monde paru fin octobre 2018, son auteur en décrit 21.

Les 10 chemins identifiés en 2017

LES 2 CHEMINS IDENTIFIÉS EN 2018

Hommage aux bénévoles du Chemin des Navigateurs par Hélène Grenier, une des actrices principales de la mouvance des chemins de marche pèlerine au Québec, et du groupe Marcher Autrement.

Les chemins québécois versus les chemins de Compostelle

  • Si l’on s’aventure de façon autonome dans la très grande majorité des cas sur les chemins de Saint-Jacques, on doit le plus souvent s’inscrire à quelque chose de pré-organisé au Québec (20 chemins sur 30).
  • Les dix parcours s’effectuant en autonomie au Québec fonctionnent tous sur le même principe : l’information sur le tracé et les services disponibles (hébergement, alimentation, etc.) est fournie soit dans un guide papier, soit sur internet. En janvier 2019, les informations pour le Chemin du Québec et la Voie des pèlerins de la Vallée n’étaient pas encore intégralement disponibles.
  • Certains des parcours sont balisés sur le terrain. Pour d’autres, il faut se contenter des guides.
  • Parmi les 20 chemins nécessitant une inscription, on note 5 modes de fonctionnement : 1 départ annuel unique avec trajet en continu (en général limité à une quinzaine de personnes) ; des départs quotidiens pendant une période déterminée (entre 15 et 25 jours en mai ou juin de chaque année, un nombre maximum de 4 ou 6 personnes) ; des chemins à moment de départ variable ; 1 fois par an, en convergence (différents lieux de départ, même lieu d’arrivée) ; 1 fois par an, en rayonnement (à partir d’un même lieu d’hébergement).
Michel O'Neill, auteur de « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré – La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 »
Michel O’Neill, auteur de « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré – La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 », paru aux aux Presses de l’Université Laval, à Québec (janvier 2017).

La dimension spirituelle des chemins de marche pèlerine du Québec en 2018

Comment qualifier un chemin de pèlerinage, ou de marche pèlerine ? Vaste débat. Michel O’Neill souligne « qu’une racine importante de la marche pèlerine québécoise demeure le pèlerinage catholique, qui implique comme toutes les formes de pèlerinage «une personne en déplacement vers un lieu sacré. Très souvent maintenant, le référent religieux catholique est absent même si ces chemins, comme toute randonnée de longue durée d’ailleurs, sont fréquemment une occasion d’introspection ou même de réflexion spirituelle.» 

Pour 12 chemins sur 30, la dimension religieuse catholique semble importante (centrale ou significative). Dans les 18 autres cas, elle ne l’est pas vraiment (marginale ou absente). L’auteur souligne que « plusieurs responsables ont insisté sur le fait que la marche de longue durée, de quelque type que ce soit, entraîne presqu’inévitablement une forme d’introspection et de réflexion sur soi. Plusieurs l’ont qualifiée de spirituelle. L’idée d’une spiritualité laïque universelle plutôt qu’encadrée par une religion particulière est revenue à plusieurs occasions.»

Chemin de Saint-Rémi, Québec
Point de départ du Chemin de Saint-Rémi, Québec

Vers une glampignisation de la marche pèlerine québécoise ?

Antón Pombo a publié sur le site espagnol Gronze une analyse des statistiques du bureau des pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Dans cet article Tendances du Camino de Santiago 2018, traduit par mes soins, l’auteur galicien souligne que « les formes de voyages sont en train de changer. Influencées par les intérêts du marché, elles répondent à de nouveaux critères : activité courte, consommation rapide, moins bénéfique pour l’utilisateur. » Le sociologue québécois se demande si « la transformation dans l’univers du camping dont on parle de plus en plus, le glamping, ne serait pas utile pour comprendre ce qui se passe dans celui de la marche pèlerine. » Et de s’interroger : « jusqu’où la marche pèlerine québécoise se glampignise-t-elle, en proposant de vivre des expériences avec de plus en plus de confort et de moins en moins d’effort ?»

Glamping : contraction de glamour et de camping, une sorte de prêt-à-camper de grand confort.

Marcher autrement au Québec
Capture d’écran du site Marcher autrement au Québec https://marcherautrement.com

Pour s’informer sur la marche pèlerine au Québec

Les grands marcheurs québécois

Les sources de cet article

1- Le livre de Michel O’Neill « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré. La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 »
2- L’état de la marche pèlerine au Québec en 2018 (62 pages en PDF)
3- La page Facebook de Michel O’Neill sur les chemins intitulée Le Serein Pèlerin

AVERTISSEMENT

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Guide des chemins de pèlerinage du monde : recension d’Éric Laliberté, directeur de Bottes et Vélo, Québec

Éric Laliberté est doctorant en théologie et agit comme observateur-participant dans le milieu du pèlerinage de longue randonnée, au Québec et en Europe, depuis une dizaine d’années. Il est directeur et cofondateur du centre de formation et d’accompagnement : Bottes et Vélo – Le pèlerin dans tous ses états, un centre visant à soutenir le pèlerin dans sa démarche. Actuellement, ses recherches s’intéressent à l’absence d’accompagnement spirituel du pèlerin-randonneur. Rédacteur d’un blogue portant sur le sujet, il est également l’auteur d’un roman voulant explorer l’expérience du pèlerinage à Compostelle, « Le champ d’étoiles ». Il est également membre étudiant de la Chaire Jeunes et religions de la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval.

Le champ d'étoiles de Éric Laliberté
Le champ d’étoiles de Éric Laliberté, Éditions Carte Blanche, Québec.

Il nous livre sa critique du Guide des chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan, paru aux Éditions Ouest-France fin octobre 2018. Sous deux formes : une chronique de 20 mn sur les ondes de Radio VM. Une recension sur le site web La Montagne des Dieux.

Un grand merci à Éric qui participera du 5 au 7 avril 2019 au Forum des chemins de pèlerinage à Paris (Forum 104). Il interviendra également avec son compatriote Michel O’Neill, chercheur et auteur du livre « Entre St-Jacques-de-Compostelle et Ste-Anne-de-Beaupré, la marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 », paru aux Presses de l’Université Laval (Québec), dans un atelier sur le thème des Pèlerins du monde que j’aurai l’honneur d’animer.

Chronique d’Eric Laliberté sur Radio VM – Québec sur le Guide des chemins de pèlerinage du monde

Guide des Chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France
L’auteure de ce site a publié fin 2018 un Guide des Chemins de pèlerinage du monde de 480 pages sur les 5 continents (et 43 pays).

Le 8 janvier 2019, Éric Laliberté présentait le Guide des chemins de pèlerinage du monde dans sa chronique hebdomadaire « Mouvance contemporaine et quête spirituelle ».
Sujet : Faire le tour du monde en pèlerinage. Un guide, un site (19 mn).  En voici les grands traits. 

  • Il marque quelque chose de nouveau dans ce domaine.
  • Un livre très bien fait, en couleur, beaucoup de photos, facile à consulter, des cartes dessinées par une jeune bretonne, Morgane Gransard, installée à Montréal.
  • On peut partir d’Athènes, de Varsovie, de Trondheim en Norvège. Le plus long chemin de pèlerinage part de l’Antarctique. 
  • Le site Chemins vers le Sacré, présente bien sûr le livre, mais il veut fédérer les pèlerinages de longue randonnée dans toutes les traditions dans le monde entier (autochtones, hindous, japonaises, bouddhistes…).
  • Le pèlerinage ne se fonde-t-il pas plutôt sur une expérience, plutôt qu’un cheminement vers un site sacré ? Sur une expérience intérieure ? L’auteure ouvre peut-être la porte à une nouvelle définition. On retrouve par exemple dans le livre des chemins québécois qui ne correspondent pas à la définition donnée par Fabienne Bodan. Tout dépend aussi de l’intention que l’on met dans son chemin.
  • Beaucoup de chemins font référence à Compostelle. Un peu partout dans le monde, des initiatives sont inspirées par Compostelle. Un nouveau paradigme est en train d’émerger, et ce sera en partie le sujet de ma thèse de doctorant.  
  • On accorde beaucoup d’importance à l’objet chemins, mais ce n’est pas là que ça se joue. Ce qui importe, c’est l’expérience. Je pense, par exemple, à cette jeune journaliste sur le Pacific Crest Trail. Elle a vécu une expérience spirituelle qui a transformé sa vie.

Recension d’Éric Laliberté sur le site La montagne des Dieux

Le directeur de Bottes et Vélo – Le pèlerin dans tous ses états présente le Guide des chemins de pèlerinage du monde sur la Montagne des Dieux, un site web québécois spécialisé dans les religions et la spiritualité.

Recension Guide des chemins de pèlerinage du monde sur la Montagne des Dieux
Recension Guide des chemins de pèlerinage du monde sur le site québécois de la Montagne des Dieux. Par Éric Laliberté, directeur de Bottes et vélo.

Le pèlerin-randonneur fait de plus en plus parler de lui et son activité marquera sans doute ce siècle. Fabienne Bodan, Bretonne d’origine, le confirme par un guide de plus de 470 pages qu’elle vient de publier aux Éditions Ouest-France : Guide des chemins de pèlerinage du monde. Ayant recensé près de 800 chemins de pèlerinage, elle propose d’en faire un tour du monde, toutes traditions confondues. Cet ouvrage inédit rappelle combien cette pratique séculaire, loin de s’éteindre, continue d’en faire marcher plus d’un. Lire la suite sur le site de la Montagne des Dieux  –Télécharger le PDF de l’article

Précisions de l’auteure du guide

  1. Voyageuse plus que marcheuse. Si je voyage depuis plus de 35 ans à travers le monde, avec un Tour du Monde de 14 mois à mon actif en 1991-1992, je n’ai pas arpenté tous les chemins dont je parle dans mon guide. Une vie n’y suffirait pas. Mais j’aime marcher lorsque je voyage, car je considère que c’est le meilleur moyen d’explorer les lieux. Et aussi d’être proche des peuples des pays moins aisés que les nôtres. J’ai marché en Himalaya au Népal et au Ladakh, en Amérique du Sud en Équateur et au Chili. J’ai parcouru à ce jour 4000 kilomètres sur les chemins de Compostelle en France, en Espagne et au Portugal.
  2. Itinéraires culturels européens. Sur les 31 à 33 itinéraires labellisés par le Conseil de l’Europe, cinq seulement entrent dans le champ d’investigation de mon ouvrage. Les autres ne sont pas des chemins praticables à pied (ou à vélo ou à cheval). Il s’agit des chemins de Saint-Jacques. De Saint-Olav. La Via francigena. L’itinéraire Sur les pas des huguenots et des vaudois. La Via Sancti Martini. Les chemins clunisiens.
  3. La définition des chemins de pèlerinage. Vaste débat. Je me suis cantonnée à ma définition, en intégrant également les chemins inspirés par Compostelle. Ce qui est le cas de la plupart des chemins québécois. Mais aussi d’Australie. Du Brésil. D’Afrique du Sud. Je suis d’accord avec Éric quand il dit que l’expérience de la marche au long cours est profondément transformatrice. Les épopées sur les chemins longue distance sont donc à mon sens tout autant spirituelles que les cheminements sur les itinéraires de pèlerinage. Mais je sortais là des limites que j’avais moi-même définies. Et je ne disposais au départ que de 384 pages.
  4. Je voulais que ce livre s’intitule « Chemins vers le Sacré », pour éviter toute contestation autour de la terminologie employée. Mon éditeur a choisi un autre titre. Je pense que nous assistons depuis le début du troisième millénaire, et tout particulièrement depuis les années 2010, à une quête de sens et de spiritualité. J’ai discuté avec de nombreux pèlerins. J’ai souhaité écrire un livre qui s’adresse à tous les profils que l’on rencontre sur les chemins, car une majorité ne part pas avec des motivations de pèlerinage religieux. Beaucoup s’élancent plutôt en quête de réparation, de transformation, de réponse, d’humanité, d’authenticité et de fraternité. Et c’est bien là l’atmosphère que cherchent à reconstituer les marcheurs des chemins européens lorsqu’ils rentrent dans leurs pays respectifs. Et la motivation première de ces caminos Compostelle-like
Éric Laliberté, cofondateur de Bottes et Vélo, Québec
Éric Laliberté, directeur et cofondateur de Bottes et Vélo – Le pèlerin dans tous ses états, un centre visant à soutenir le pèlerin dans sa démarche.

Guide des chemins de pèlerinage du monde : la critique du sociologue québécois Michel O’Neill

Michel O’Neill est sociologue, professeur émérite de l’Université Laval où il a enseigné pendant 30 ans dans le domaine de la santé et chercheur à la Chaire Jeunes et Religions de l’université de la ville de Québec. Il a parcouru deux fois les chemins de Compostelle (en 2003 depuis le Puy-en-Velay et en 2013 depuis Paris). Il est l’auteur du livre « Entre St-Jacques-de-Compostelle et Ste-Anne-de-Beaupré, la marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 » , paru aux Presses de l’Université Laval. Nous avions présenté son ouvrage de référence sur ce site fin 2017. Il nous livre sa critique du Guide des chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan, paru aux Éditions Ouest-France fin octobre 2018.

Michel O’Neill m’a fait l’honneur de publier une critique de mon Guide des chemins de pèlerinage du monde sur sa page Facebook intitulée Le Serein Pèlerin. Avec son accord, je reproduis ici son analyse sans la moindre intervention. J’y ai simplement ajouté des têtes de chapitre pour en faciliter la lecture. Un grand merci à Michel qui participera du 5 au 7 avril 2019 au Forum des chemins de pèlerinage à Paris (Forum 104). Il interviendra également avec son compatriote Éric Laliberté, cofondateur du site Bottes et Vélo, dans un atelier sur le thème des Pèlerins du monde que j’aurai l’honneur d’animer.

Introduction

À propos de l’ouvrage de Fabienne Bodan «Guide des chemins de pèlerinage du monde», Rennes, Éditions Ouest-France, 472 pages, 2018. En librairie au Québec : 59,99$ plus taxes. En commande directe auprès de l’auteure depuis le Québec : autour de 65$ (http://cheminsverslesacre.com/, copie dédicacée).

À la toute fin de 2018 paraissait cet ouvrage remarquable qui fera sans doute époque. Je l’analyse ici du double point de vue d’un marcheur et sociologue québécois qui s’intéresse à ce que j’ai appelé la marche pèlerine (https://www.pulaval.com/…/la-marche-pelerine-quebecoise-dep…). J’ai forgé cette expression pour désigner la longue randonnée en milieu habité mise à la mode par la recrudescence de popularité du pèlerinage vers St-Jacques-de-Compostelle vers la fin des années 1980, afin de faire ressortir que ce type de longue randonnée n’a plus nécessairement comme destination un sanctuaire sacré, religieux ou non, comme l’est encore le pèlerinage. Je parle d’abord de la facture du livre puis de son organisation pour, finalement, m‘attarder à son contenu.

Guide des Chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France
Fabienne Bodan, webmaster des sites https://pelerinsdecompostelle.com et http://cheminsverslesacre.com a publié fin 2018 un Guide des Chemins de pèlerinage du monde de 480 pages sur les 5 continents (et 43 pays).

Plutôt qu’un guide, un répertoire…

C’est sans contredit un très «beau livre» : papier glacé, couleur, photographies spectaculaires et des dizaines de cartes originales par Morgane Gransard, remarquables à la fois pour leur clarté et leur esthétisme. Le titre en est toutefois un peu trompeur : ni le poids de l’ouvrage, ni son degré de précision ne permettent de l’utiliser comme outil de marche sur le terrain, ce que l’expression «guide» pourrait porter à penser. Ce n’était vraisemblablement pas son intention et peut-être que le mot «répertoire» aurait été préférable car l’ouvrage fournit suffisamment d’information pour permettre au marcheur potentiel de repérer les ressources nécessaires à la planification détaillée de son périple. C’est de fait une sorte de catalogue qui, même s’il ne prétend pas à l’exhaustivité, élargit de manière extraordinaire l’horizon des parcours auxquels, tant le marcheur que toute personne intéressée par la marche pèlerine de n’importe où sur la planète, peut s’intéresser.

Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan (extrait page Europe)
Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan (extrait page Europe) : France, Italie, République Tchèque, Allemagne…

Un ouvrage en trois parties

Pour ce faire, l’ouvrage est divisé en trois parties : une première où l’on trouve d’entrée de jeu un mode d’emploi de l’ouvrage, un sommaire et une introduction. Dans la seconde, de loin la plus considérable, est offerte, continent par continent (Europe, Asie, Amérique, Océanie, Afrique), la description des presque 800 parcours répertoriés. Dans la troisième, à la fin, divers outils sont proposés permettant de naviguer facilement dans l’ouvrage ou de pousser plus loin la documentation des parcours qui ont suscité notre curiosité. On y trouve une liste des cartes, une bibliographie, une liste en 35 pages de tous les chemins couverts avec une phrase le résumant. Mais aussi des pictogrammes quant aux types de personnes qui peuvent le parcourir (marcheur, cycliste, cavalier ou marin) et la page où le retrouver. Des remerciements. Des indications sur comment des sites internet démarrés par l’auteure complètent l’ouvrage.

Se retrouver est un jeu d’enfant, à un bémol près…

Et, finalement, une table des matières en quatre pages où tous les chemins sont accessibles d’un rapide coup d’œil. Un code de couleurs sur la tranche du livre facilite encore plus sa consultation. L’ensemble des outils reprenant toujours le même ordre de présentation, s’y retrouver est donc un jeu d’enfant. À un bémol près : on annonce d’entrée de jeu (p.4) que les adresses internet de la plupart des chemins sont disponibles. Mais cela prend un certain temps avant de réaliser qu’elles se retrouvent dans la bibliographie. Si cette dernière n’avait inclus que les ouvrages papier ou les sites généraux, et si l’adresse internet de chaque parcours avait été mentionnée soit lorsqu’il est traité dans le corps du texte, soit dans la liste de 35 pages les résumant tous, cela en aurait facilité la consultation.

Fabienne Bodan à Fisterra
Fabienne Bodan, auteure du Guide des chemins de pèlerinage du monde, à Fisterra, le Finistère espagnol. La fin mythique du chemin. Avec notre mascotte de la Via de la Plata (point de départ : Séville) où les cigognes et leurs nids géants perchés sur le toit des églises nous ont accompagnés sur 1000 kilomètres. Mai 2015. © Fabienne Bodan

Une quête existentielle pour point de départ

Au contenu maintenant. L’introduction est écrite comme le reste de l’ouvrage dans le style précis, concis et attrayant de la journaliste d’expérience. Elle nous explique ce qui, dans sa vie personnelle et professionnelle, a suscité le désir de se lancer dans l’entreprise un peu folle de cet ouvrage immense. Comme pour beaucoup de pèlerin-es, une sorte de quête existentielle, souvent un peu diffuse, la propulse en 2012 sur la Via Podiensis des chemins de Compostelle. Elle y retournera à plusieurs reprises par la suite. Elle y consacre maintenant (en partie, NDLR) sa vie professionnelle, en élargissant son horizon à l’ensemble des chemins de pèlerinage de la planète. Le sociologue en moi aurait aimé un peu plus de détails sur sa définition de «sacré» et de «chemin de pèlerinage». De même que sur la manière dont elle s’y est pris pour repérer les presque 800 chemins retenus et pour décider d’inclure ou non dans son livre les parcours ainsi trouvés. Comme il n’y a aucune «… prétention à l’exhaustivité (p.9)» et comme le livre est déjà un véritable coffre aux trésors d’information, c’est toutefois un moindre mal.

Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan, mode d'emploi
Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan, mode d’emploi.

Une ouverture aux autres cultures, traditions religieuses ou approches du sacré

La description des chemins, présentée par continent, suit toujours la même logique : d’abord les chemins qui parcourent plusieurs pays suivis des chemins à l’intérieur des pays. Quelque 415 pages sont dévolues à la description de ces itinéraires, parfois détaillée, parfois plus synthétique, toujours concise et informative. Près de 60% sont consacrées à l’Europe, l’origine française et chrétienne de l’auteure ayant inévitablement joué. Cela laisse néanmoins plus de 40% d’itinéraires non-européens, témoignant de sa réelle ouverture aux autres cultures, traditions religieuses ou approches du sacré. En sus des descriptions et des cartes, on retrouve fréquemment des encarts «en pratique», qui donnent des détails plus précis pour qui veut davantage d’information afin de pérégriner sur tel ou tel itinéraire, de même qu’une nomenclature de certains «lieux sacrés» qui le jalonnent.

"Guide chemins de pèlerinage du monde" de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France, chapitre Amérique.
« Guide chemins de pèlerinage du monde » de Fabienne Bodan aux Éditions Ouest-France, chapitre Amérique.

20 pages consacrées aux chemins québécois

Pour l’Amérique du Nord, près de 20 pages sont consacrées aux divers chemins québécois (deux pour les chemins ailleurs au Canada et 10 pour ceux aux États-Unis…). Comme c’est un sujet que je connais bien, il m’a permis de mesurer jusqu’où l’auteure comprenait ce qui se passe dans un endroit qui n’est pas sa France natale. À quelques petites erreurs près, le test est réussi haut la main. Il permet de croire que le même degré de précision et de fiabilité a été appliqué dans le reste de l’ouvrage, ce qui est fort rassurant. Aux personnes du Québec qui souhaitent élargir la palette des itinéraires où elles pourraient pratiquer la marche pèlerine à travers le monde, il offre ainsi de fabuleuses possibilités tout en permettant aux gens de l’extérieur de préparer leur séjour québécois en comprenant les divers types d’itinéraires qui s’y offrent à eux.

Site web Chemins vers le Sacré de Fabienne Bodan
Site web Chemins vers le Sacré de Fabienne Bodan. Il accompagne le Guide des chemins de pèlerinage du monde de la même auteure.

Un regret : l’absence d’une version électronique

En conclusion, un des inconvénients de tout répertoire papier demeure qu’aussitôt imprimé il n’est plus à jour, la situation évoluant sans cesse surtout quand on fait le choix de prendre la planète comme territoire à couvrir. On peut donc déplorer que l’éditeur n’ait pas choisi de faire aussi une version électronique de l’ouvrage, plus facile à mettre à jour et à acheter quand on vit hors de la France. Attendu son statut de langue internationale qui permettrait d’élargir très significativement le public lecteur de ce livre dont je ne connais aucun équivalent ailleurs, une version dans la langue de Shakespeare connaîtrait sans doute un vif succès. Finalement, comme l’auteure a mis sur pied, en complément au livre, un site internet et une page d’échanges multilingues sur Facebook pour lesquels elle a de grandes ambitions, cela lui permettra au besoin de faire des corrections ou la mise à jour de certaines informations en plus d’offrir un espace international d’échanges sur la marche pèlerine.

Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan (Sommaire)
Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan : sommaire de l’ouvrage.

On ne peut donc que saluer bien bas la parution de l’ouvrage et de ses compléments internet en s’émerveillant de la quantité titanesque de travail accompli par l’auteure dans un laps de temps somme toute fort limité. À lire à tout prix donc, où que vous soyez sur la planète, si la marche pèlerine vous intéresse.

Michel O'Neill, auteur de « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré – La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 »
Michel O’Neill, auteur de « Entre Saint-Jacques-de-Compostelle et Sainte-Anne-de-Beaupré – La marche pèlerine québécoise depuis les années 1990 », paru aux aux Presses de l’Université Laval, à Québec (janvier 2017).

Michel O’Neill
Le Ser(e)in pèlerin
Chercheur autonome membre de la Chaire Jeunes et religions, Université Laval
Québec

Quelques réponses de l’auteure…

Je profite de l’outil internet pour répondre en direct à certains points soulevés très justement par Michel.

  1. L’emploi du terme « Guide ». Il est relatif aux informations résolument pratiques qu’il contient. Mais en aucun cas, je n’imaginais que mes lecteurs puissent l’emporter avec eux sur les chemins ou en voyage. C’est un ouvrage que l’on consulte chez soi, bien confortablement installé. Il a pour vocation de susciter de nouvelles envies de voyages et de cheminements vers le Sacré.
  2. Les adresses internet de la plupart des chemins. J’admets tout à fait la critique de Michel à ce sujet. Si nous avons décidé avec l’éditeur de concentrer toutes ces URL à la fin de l’ouvrage dans la bibliographie, c’est pour une raison simple. Si nous devions effectuer une mise à jour de cet ouvrage et en publier une deuxième édition, il serait beaucoup plus facile d’actualiser toutes ces données, somme toutes volatiles, concentrées dans ces quelques pages. Dans le cas contraire, il faudrait corriger chaque page, ce qui engendrerait un surcroît de travail pour les maquettistes. C’est aussi pour cette raison que nous avons décidé de ne pas citer les coordonnées des créateurs de chemins (téléphones, e-mails). Un bon compromis pouvait être d’intégrer les URLs des sites web dans les 35 pages listant les chemins de manière synthétique.
  3. Près de 60% sont consacrées à l’Europe, l’origine française et chrétienne de l’auteure ayant inévitablement joué. Non, c’est tout simplement parce que sur certains continents il y a beaucoup moins de chemins de pèlerinage, du moins ne les ai-je pas trouvés. En outre, l’accès à l’information n’est pas toujours aisé, et le temps et la place dont je disposais (au départ 384 pages) ne m’ont pas permis de pousser plus loin mes investigations, du moins pour cet ouvrage. Et parfois, il n’existe pas de traditions de pérégrination au long cours vers les sanctuaires. Je n’ai retenu, sauf exceptions, que les itinéraires dont la distance excède les 100 kilomètres.
  4. Version électronique de l’ouvrage. Elle relève du seul choix de l’éditeur. En effet, j’ai constaté la difficulté pour les résidents non-européens de se procurer l’ouvrage. J’essaye d’expédier des exemplaires dédicacés à ceux qui m’en font la demande, mais nous nous heurtons aux frais de virement internationaux rédhibitoires eu égard au prix du livre.
  5. Mise à jour de l’ouvrage. Selon moi, on ne peut plus à l’heure actuelle écrire un livre ou fabriquer un quelconque produit sans l’accompagner d’un site web et d’une présence sur les réseaux sociaux. Tout cela représente un énorme travail supplémentaire, surtout quand l’auteur-e se charge de l’ensemble. Ce qui est mon cas. Je réfléchis à l’usage du site qui accompagne le guide, Chemins vers le Sacré, pour les mises à jour du guide. Toutes les suggestions, tant sur le fond que sur la forme, sont les bienvenues.
  6. Espace international d’échanges sur la marche pèlerine. Tout reste à construire. Mais l’idée d’une plateforme internationale commune me semble évidente. Il faudra cependant trouver soit des bénévoles soit des financements pour mener ce projet à bien.
  7. Versions de l’ouvrage en d’autres langues. À commencer par l’anglais. C’est mon voeu le plus cher. Le positionnement de l’ouvrage, et l’engouement des anglophones du monde entier pour les chemins de pèlerinage justifierait en effet la traduction de cet ouvrage en anglais, mais aussi en d’autres langues. Là aussi, cela relève de la volonté et de la décision de l’éditeur. Tout dépendra certainement du succès du guide dans sa version française.
Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan (extrait page Afrique)
Guide chemins de pèlerinage du monde de Fabienne Bodan (extrait page Afrique) : Éthiopie, Algérie, Tunisie.

Revue de presse des chemins de pèlerinage semaine 46 de 2017

Une revue de la presse francophone, anglophone, hispanophone sur les chemins et les pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle, du dimanche 12.11.2017 au samedi 18.11.2017

EL CAMINO from the AIR : La RIOJA et BURGOS

Vous avez découvert le premier épisode au départ de Saint-Jean-Pied-De-Port dans la dernière revue de presse. Voici le deuxième épisode sur le camino francés vu du ciel. Ajoutée le 11.11.2017 par SummitXtreme Continuer la lecture

Revue de presse des chemins de pèlerinage semaine 40 de 2017


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Une revue de presse des chemins de pèlerinage semaine 40 de 2017, francophone, anglophone, hispanophone, du dimanche 1.10.2017 au samedi 7.10.2017 Continuer la lecture

Pèlerine du Québec : Roxane et l’attrapeur de rêves

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Pèlerine du Québec. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

4 septembre 2012. Roxane, jeune québécoise de 24 ans, entame son périple compostellan. Elle a accroché à son sac à dos, un “capteur de rêves” et une multitude de petits flacons.

Globe-Trotters Magazine : Comment t’est venue l’idée de partir sur les Chemins de Compostelle ?

Roxane Bellerose-Morin : Je revenais de quinze mois en Océanie et Asie du sud-est où j’avais passé le plus clair de mon temps dans une tente et sur la route, à simplement m’amuser et vivre. Ma perception de la réalité québécoise avait complètement changé et mes relations humaines se détérioraient de jour en jour. Je faisais du bénévolat pour compenser ce mal de vivre dans cette société. C’est alors qu’une amie m’a demandé quel serait mon prochain voyage. J’ai répondu sans vraiment réfléchir que les Chemins de Compostelle m’avaient toujours intriguée : l’appel de la nature, la simplicité du style de vie…

Ce sac à dos m'intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l'attrapeur de rêves ? © Fabienne Bodan

Pèlerine du Québec. Ce sac à dos m’intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l’attrapeur de rêves ?
© Fabienne Bodan

Pourquoi as-tu emporté ce capteur de rêves, toi la pèlerine du Québec ?

J’avais organisé en août une “journée de rêves”. Chacun devait écrire sa plus grande aspiration sur un papier d’une couleur qui le représentait. En accrochant au capteur de rêves des petits flacons contenant ces petits bouts de papier, j’ai emporté tous ces voeux vers Compostelle. C’était purement symbolique : mon but premier était que les personnes réveillent leurs aspirations. Même si leur rêve ne parvenait pas à destination, il resterait toujours dans leurs pensées ! Et pour moi, ça me permettait d’accessoiriser mon sac à dos. Un ami en Espagne m’a donné une plume de paon et une autre de hibou, car toutes mes plumes avaient disparues depuis Toulouse! Le flacon d’une amie s’est échappé au moment même où il se passait un grand changement positif dans sa vie!

A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s'entendit répondre : "Saint Jacques de Compostelle" ! ©Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s’entendit répondre : « Saint Jacques de Compostelle » ! ©Roxane Bellerose-Morin

Le Chemin n’a pas été de tout repos pour toi…

J’ai du parfois prendre le bus ou faire du stop pour soulager mes chevilles. Lorsque je suis montée à la Cruz del Ferro (NDLR : l’un des lieux mythiques du Camino francés, où les pèlerins déposent une pierre ou un objet emportés de chez eux, comme pour se délester symboliquement de ce qui ne leur convient plus dans leur vie), j’ai compris plein de choses. Le soir, mes tendinites aux deux chevilles avaient empiré. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange. J’ai rencontré une dame qui m’a fait prendre conscience que “la façon dont je faisais le chemin était identique à la façon de gérer ma vie”.

Marcher à l’envers

Du coup, j’ai eu un flash en m’endormant le soir : refaire un bout du chemin parcouru… à l’envers. Je voulais me faire prendre conscience que dans la vie, il faut passer par des étapes ennuyeuses : lorsqu’on cherche à l’éviter, il se peut que les conséquences soient pires. Marcher à l’envers faisait encore plus de sens parce que ça allait ajouter de la difficulté dans l’expérience. Du coup, je me suis habituée au silence et j’ai apprécié ma compagnie. J’ai réussi à m’écouter. J’ai cessé d’être influencée par les autres. Je n’ai pas atteint ma destination : ma dernière journée de marche a nécessité cinq heures pour…cinq kilomètres. Les tendinites étaient définitivement revenues. J’ai donc pris le train pour Santiago et ensuite l’avion pour Barcelone et Toulouse. Deux jours plus tard, je m’envolais pour Montréal.

Perclue de tendinites, Roxane n'atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Perclue de tendinites, Roxane n’atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l'est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l’est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Envisages-tu, malgré tout, de revenir sur les Chemins de Compostelle ?

Oh oui. En avril 2014 ! Je veux marcher sur la voie d’Arles, et terminer le Camino francés.

Qu’est-ce qui a changé dans ta vie depuis ton retour du Chemin ?

Ma peur bleue des chiens a disparu. En outre, je trouve la Cathédrale de mon village magnifique. Je parle aux étrangers avec une aisance remarquable. Désormais, je comprends l’espagnol. Je ressens le besoin de marcher à l’extérieur chaque jour. J’ai appris comment faire des capteurs de rêves. Enfin, j’ai décidé de faire, une à une, toutes les choses dont je rêve…

Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s'est inscrite dans une école d'arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s’est inscrite dans une école d’arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Propos recueillis par Fabienne Bodan (56)