Richard et Vincent, père et fils sur le Camino

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Père et fils sur le Camino. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Père et fils sur le Camino à l’unisson

Ils cheminent à l’unisson. Tantôt l’un, tantôt l’autre ouvre la marche. Ils sont équipés de sacs à dos, capes de pluie, sacs de couchage identiques. Ils ne se quittent jamais, s’adaptent au rythme de l’autre, soutiennent l’exercice physique et moral de l’autre, décident, ensemble, sereinement, de leur étape du lendemain le soir à la veillée. Complices, Richard, 70 ans, et Vincent, 40 ans, père et fils, se sont immergés dans l’aventure compostellane en deux grandes étapes : du Puy-en-Velais à Roncevaux en octobre 2011, de Roncevaux à Santiago de Compostelle en octobre 2012.

Globe-Trotters Magazine : Lequel d’entre vous a eu cette idée ?

Vincent : Moi. Je voulais entreprendre quelque chose. Je le sentais, sans trop savoir quoi, ni pourquoi. J’ai vu un reportage sur Compostelle. Et là, je me suis dit : “c’est ça que je veux faire”.

Richard : Vincent nous a exposé son projet. Il n’avait pas envie de partir seul. Alors ma femme m’a dit : “pourquoi ne partirais-tu pas avec ton fils ?”. Et voilà comment, à mon âge, malgré mes douleurs au dos et aux genoux, je me suis lancé dans cette folle aventure.

Col de San Roque, entre O Cebreiro et Triacastela (Camino francés), ou le début d'une journée pluvieuse qui verra Richard et Vincent arriver trempés jusqu'aux os et aux bout des orteils au gîte de l'étape. © Fabienne Bodan

Père et fils sur le Camino. Col de San Roque, entre O Cebreiro et Triacastela (Camino francés), ou le début d’une journée pluvieuse qui verra Richard et Vincent arriver trempés jusqu’aux os et aux bout des orteils au gîte de l’étape. © Fabienne Bodan

Votre complicité est émouvante. Marcher ensemble vous a permis d’aller jusqu’au bout ?

Richard : L’an dernier, mon genou s’est bloqué. Heureusement qu’un soir, dans un gîte, j’ai rencontré un kinésithérapeute qui me l’a remis en place. Je ne pouvais pas arrêter, car Vincent aurait dû faire de même. Je n’avais pas le droit de compromettre son projet. Soit nous parvenions ensemble à destination, soit nous arrêtions tous les deux.

Vincent : L’an dernier, mon père s’est blessé. Cette année, c’est moi, avec cette tendinite qui a bien failli m’empêcher d’arriver à Santiago. A mon tour, je ne pouvais pas renoncer, ni pour moi, ni pour lui. Pas si près du but.

Que retirez-vous de ce voyage ?

Richard, Vincent : Pour nous, il s’agissait d’un défi physique. Une randonnée au long cours pour aller jusqu’au bout de nous-mêmes. En rentrant, nous avons attaqué Roanne-Thiers, une marche de 57 kilomètres dont la première édition a eu lieu en 1925. Le départ a lieu à minuit, il faut arriver avant midi. Avec nos 800 kilomètres du Camino francés, nous étions entraînés !

La cathédrale de Saint Jacques de Compostelle n'est plus qu'à 4 kilomètres. Mais Richard et Vincent savourent déjà la joie inénarrable de l'arrivée ! © Fabienne Bodan

Père et fils sur le Camino. La cathédrale de Saint Jacques de Compostelle n’est plus qu’à 4 kilomètres. Mais Richard et Vincent savourent déjà la joie inénarrable de l’arrivée ! © Fabienne Bodan

Propos recueillis par Fabienne Bodan 

Pèlerine du Québec : Roxane et l’attrapeur de rêves

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Pèlerine du Québec. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

4 septembre 2012. Roxane, jeune québécoise de 24 ans, entame son périple compostellan. Elle a accroché à son sac à dos, un “capteur de rêves” et une multitude de petits flacons.

Globe-Trotters Magazine : Comment t’est venue l’idée de partir sur les Chemins de Compostelle ?

Roxane Bellerose-Morin : Je revenais de quinze mois en Océanie et Asie du sud-est où j’avais passé le plus clair de mon temps dans une tente et sur la route, à simplement m’amuser et vivre. Ma perception de la réalité québécoise avait complètement changé et mes relations humaines se détérioraient de jour en jour. Je faisais du bénévolat pour compenser ce mal de vivre dans cette société. C’est alors qu’une amie m’a demandé quel serait mon prochain voyage. J’ai répondu sans vraiment réfléchir que les Chemins de Compostelle m’avaient toujours intriguée : l’appel de la nature, la simplicité du style de vie…

Ce sac à dos m'intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l'attrapeur de rêves ? © Fabienne Bodan

Pèlerine du Québec. Ce sac à dos m’intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l’attrapeur de rêves ?
© Fabienne Bodan

Pourquoi as-tu emporté ce capteur de rêves, toi la pèlerine du Québec ?

J’avais organisé en août une “journée de rêves”. Chacun devait écrire sa plus grande aspiration sur un papier d’une couleur qui le représentait. En accrochant au capteur de rêves des petits flacons contenant ces petits bouts de papier, j’ai emporté tous ces voeux vers Compostelle. C’était purement symbolique : mon but premier était que les personnes réveillent leurs aspirations. Même si leur rêve ne parvenait pas à destination, il resterait toujours dans leurs pensées ! Et pour moi, ça me permettait d’accessoiriser mon sac à dos. Un ami en Espagne m’a donné une plume de paon et une autre de hibou, car toutes mes plumes avaient disparues depuis Toulouse! Le flacon d’une amie s’est échappé au moment même où il se passait un grand changement positif dans sa vie!

A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s'entendit répondre : "Saint Jacques de Compostelle" ! ©Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s’entendit répondre : « Saint Jacques de Compostelle » ! ©Roxane Bellerose-Morin

Le Chemin n’a pas été de tout repos pour toi…

J’ai du parfois prendre le bus ou faire du stop pour soulager mes chevilles. Lorsque je suis montée à la Cruz del Ferro (NDLR : l’un des lieux mythiques du Camino francés, où les pèlerins déposent une pierre ou un objet emportés de chez eux, comme pour se délester symboliquement de ce qui ne leur convient plus dans leur vie), j’ai compris plein de choses. Le soir, mes tendinites aux deux chevilles avaient empiré. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange. J’ai rencontré une dame qui m’a fait prendre conscience que “la façon dont je faisais le chemin était identique à la façon de gérer ma vie”.

Marcher à l’envers

Du coup, j’ai eu un flash en m’endormant le soir : refaire un bout du chemin parcouru… à l’envers. Je voulais me faire prendre conscience que dans la vie, il faut passer par des étapes ennuyeuses : lorsqu’on cherche à l’éviter, il se peut que les conséquences soient pires. Marcher à l’envers faisait encore plus de sens parce que ça allait ajouter de la difficulté dans l’expérience. Du coup, je me suis habituée au silence et j’ai apprécié ma compagnie. J’ai réussi à m’écouter. J’ai cessé d’être influencée par les autres. Je n’ai pas atteint ma destination : ma dernière journée de marche a nécessité cinq heures pour…cinq kilomètres. Les tendinites étaient définitivement revenues. J’ai donc pris le train pour Santiago et ensuite l’avion pour Barcelone et Toulouse. Deux jours plus tard, je m’envolais pour Montréal.

Perclue de tendinites, Roxane n'atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Perclue de tendinites, Roxane n’atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l'est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l’est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Envisages-tu, malgré tout, de revenir sur les Chemins de Compostelle ?

Oh oui. En avril 2014 ! Je veux marcher sur la voie d’Arles, et terminer le Camino francés.

Qu’est-ce qui a changé dans ta vie depuis ton retour du Chemin ?

Ma peur bleue des chiens a disparu. En outre, je trouve la Cathédrale de mon village magnifique. Je parle aux étrangers avec une aisance remarquable. Désormais, je comprends l’espagnol. Je ressens le besoin de marcher à l’extérieur chaque jour. J’ai appris comment faire des capteurs de rêves. Enfin, j’ai décidé de faire, une à une, toutes les choses dont je rêve…

Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s'est inscrite dans une école d'arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s’est inscrite dans une école d’arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Propos recueillis par Fabienne Bodan (56)

Jan, le pèlerin d’Anvers

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM(Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Pèlerin d’Anvers. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Je vous ai parlé dans l’article précédent des circonstances de ma rencontre avec Jan, dans l’ascension du col de Roncevaux. Voici, comme promis, l’interview qu’il m’a accordée.

Pèlerin d’Anvers : 2000 kilomètres à pied vers Compostelle

L’idée lui trottait dans la tête depuis sept ans. Il attend la retraite pour concrétiser son projet. Jan a 57 ans. Le flamand d’Anvers s’élance le 2 juillet 2012, du seuil de sa maison, dans un grand périple en solitaire de 2 000 kilomètres vers Saint Jacques de Compostelle. Il s’est entraîné depuis le début de l’année sur 1 400 kilomètres, lestant son sac de bouteilles en plastique remplies de pierres, porte 26 kilos dans son sac à dos, car il a choisi l’autonomie intégrale du camping. Trois mois plus tard, il parvient à destination.

Globe-Trotters Magazine : Qu’est-ce qui t’a donné cette idée ?

Jan : Une émission de télé. Un jeune reporter, caméra sur la tête, effectuait le chemin en hiver. Tous les jours, on montrait pendant une dizaine de minutes les images de son aventure.

“Partir en pèlerinage signifie abandonner pour recevoir et devenir à nouveau un véritable être humain”. En quoi cette phrase t’a-t-elle inspirée dans ta démarche?

Je voulais effectuer une parenthèse dans ma vie pour faire le point. Non sur papier mais dans mon esprit. J’ai eu le privilège d’avoir une famille formidable, une femme douce et délicate, des enfants ayant trouvé leurs voies respectives, une bonne santé, un métier qui me plaisait et la liberté, au sein de ma famille, de m’exprimer et de demeurer moi-même. Je me sentais privilégié, heureux. Je souhaitais m’imprégner profondément de cette sensation, remercier la vie pour ce qu’elle m’avait offert. Un peu comme un contrepoids à l’injustice, la misère et le chagrin de nombre de personnes sur la terre. Santiago représentait la destination mais certainement pas le but du voyage. Non, le but ultime consistait en cette longue route qui me permettrait la rencontre avec…moi-même.

Comment as-tu associé les tiens à cette aventure ?

J’ai dédié ce pèlerinage à ma famille, ma femme et mes enfants, mes amis, par gratitude pour l’affection et la joie qu’ils m’ont données. Chaque jour, je marchais pour une personne en particulier. Ainsi, j’ai consacré l’étape la plus difficile de mon parcours, l’ascension du col de Roncevaux, à ma soeur accidentée. Une autre chose me tenait à coeur : je voulais me libérer de cette petite colère qui tourmentait mon âme, parce que j’ai déçu des gens dans ma vie, et que mon incapacité à transformer cette déception provoquait cette colère. Alors j’espérais que ce chemin ouvrirait ces coeurs pétrifiés et qu’ils m’accorderaient leur pardon.

Comment vois-tu la vie désormais, toi le « pèlerin d’Anvers » ?

Je ne crois pas que cette expérience ait fondamentalement changé ma vie. Cependant, j’ai pris conscience de ma propre valeur, et je n’ai plus besoin de reconnaissance. Cela me met à l’abri des flatteries de personnes peu sincères. J’ai appris que le hasard n’existe pas, qu’une solution se présente toujours lorsque l’on se sent en péril, que les gens que l’on rencontre et apprécie sont toujours plus ou moins un miroir de soi-même, de même que ce qui nous irrite chez les autres. J’ai compris également que relativiser est la meilleure manière d’être heureux.

Propos recueillis par Fabienne Bodan (56)

Pèlerin flamand : d’Anvers et avec tous !

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM(Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l'association ABM (Aventures du Bout du Monde). Ce numéro contient 6 pages de ma plume sur les chemins de Compostelle.

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l’association ABM (Aventures du Bout du Monde). Ce numéro contient 6 pages de ma plume sur les chemins de Compostelle.

En grimpant vers Roncevaux

Je vous présente aujourd’hui Jan Van Dongen, pèlerin flamand de son état. J’ai rencontré Jan dans l’ascension du col de Roncevaux, fin août 2012. Après Saint Jean Pied de Port, l’atmosphère devient complètement internationale. Ceux qui arrivent par les chemins français voient tout à coup débouler des centaines de pèlerins venus entamer leur périple à la frontière franco-espagnole, reconnaissables à leurs tenues propres et repassées, et souvent, à leurs sacs à dos surchargés. Ne sachant plus à quelles nationalités j’avais affaire, mais ravie de rencontrer ces nouveaux pèlerins du monde entier, j’ai donc dès le début de l’étape joyeusement salué mes congénères dans les langues de ma connaissance.

Hoe gaat het met jou ?

Lorsque j’ai rencontré Jan, il m’a répondu en anglais, m’expliquant qu’il était flamand. Et alors, très fière de moi, j’ai prononcé comme je pouvais la seule phrase que je connaissais en néerlandais « Hoe gaat het met jou » (déjà là, j’ai du chercher dans plusieurs dictionnaires franco-néerlandais pour trouver comment cela s’écrit !). Et Jan de me répondre : « mais tu sais, nous les flamands de Belgique nous parlons aussi français ». Eh voilà, faites des efforts linguistiques ! Notre belle amitié a commencé comme ça.

Trois petits jours et puis s’en vont !

Nous nous sommes quittés trois jours plus tard à Pampelune. Jan poursuivait son chemin jusqu’à Santiago. Je devais pour ma part interrompre le mien pour une quinzaine de jours. Les séparations sur le chemin sont toujours déchirantes. Je me souviendrai à jamais de l’expression de tristesse et de pèlerins en perdition dans le regard de mes trois compagnons de camino, Jan, Christian et Pascal. Nous nous étions rencontrés 2 ou 3 jours auparavant. Nous devions déjà nous quitter. Je ne me suis pas retournée, de peur qu’ils ne voient mes larmes. J’ai levé le bras, de dos, pour les saluer une dernière fois. Derrière moi, Christophe et Marie-Claire m’accompagnaient dans un silence pesant. Nous devions rentrer tous les trois à Saint Jean Pied de Port. Nous n’avons pas échangé un mot de tout le trajet, et sommes rentrés dans nos auberges respectives sans avoir envie de dîner.

Un duo vers Compostelle

Jan et Christian sont parvenus à destination fin septembre 2012, en provenance respectivement d’Anvers et du Mont Saint Michel. Le jeune Pascal a fait de même quelques jours plus tard, avant de regagner son Québec natal. Christophe et Marie-Claire ont repris le chemin à Pampelune le 9 août 2013, et aux dernières nouvelles, quittaient Léon en espérant boucler leur pèlerinage dans les 30 jours qu’ils s’étaient accordés pour ce faire. Véronique, que nous n’avons pas revue le jour de notre départ, a continué son chemin jusqu’à Burgos.

Je m’aperçois aussi que ce préambule est déjà suffisamment long. Je vous donne donc rendez-vous dès demain pour l’interview de Jan. 

Hôtesse de pèlerins. Allo Véro…bobo !

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM(Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l'association ABM (Aventures du Bout du Monde). Ce numéro contient 6 pages de ma plume sur les chemins de Compostelle.

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l’association ABM (Aventures du Bout du Monde). Ce numéro contient 6 pages de ma plume sur les chemins de Compostelle, dont cet article « hôtesse de pèlerins, Allo Véro, bobo ».

Je vous présente aujourd’hui Véronique Pautrel, bien connue dans les groupes Facebook sur les chemins de Compostelle, et des pèlerins qui trouvent en elle une vraie mère poule à la Halte Pèlerine de Lectoure (Note du 15.12.2016 : après 10 ans de bons et loyaux services comme hôtesse de pèlerins, Véronique a pris une retraite bien méritée le 1.12.2016). 

Mai 2004. “Si le chemin t’appelle, vas-y…”. En lisant cette phrase concluant un livre sur les Chemins de Saint Jacques, Véronique ressent à son tour cet appel. Elle fêtera ses 50 ans à l’arrivée de son second camino.

Globe-Trotters Magazine : Tu étais à l’époque commerciale dans l’Ouest de la France pour une multinationale espagnole. Que s’est-il passé après la lecture de cet ouvrage ?

Véronique : Je gérais les grands comptes dans le quart Ouest de la France pour une multinationale espagnole. J’adorais ce que je faisais, j’avais un profond respect pour mes clients, mais je m’enfermais dans un doux ronron très confortable. Je gagnais bien ma vie. Je la dépensais bien, aussi. Mes enfants partaient pour la première fois en vacances avec leurs copains. Je me suis demandée ce que j’allais faire toute seule de tout ce temps qui s’offrait. Alors je suis descendue en voiture, seule, vers l’Espagne. J’ai laissé mon véhicule à Burgos et me suis lancée sur le Camino francés le 20 juillet 2004. Un an plus tard, le 20 juillet 2005, je réitérais, d’Oviedo, sur le Camino primitivo.

Quels souvenirs émus as-tu gardé de tes rencontres ?

Un jour, j’eus le bonheur de m’asseoir au pied d’une éolienne, non clôturée. D’admirer “ses bras” élancés. Et puis, je me suis perdue. J’ai tourné en rond deux heures en pleine chaleur : la gourde vide, hagarde, j’ai rencontré un berger et son troupeau de chèvres. Il m’a fait asseoir à l’ombre, offert un quignon de pain, un morceau de fromage, un verre de vin… et m’a remise dans la bonne direction… Sur le camino Primitivo, l’année suivante, un homme âgé, très handicapé, m’a serrée dans ses bras, me demandant de porter sa prière jusqu’à Santiago. En entrant dans la cathédrale, ma première pensée fut pour lui. J’ai eu le sentiment d’accomplir mon devoir envers lui. J’en ai encore les larmes aux yeux…

La fin de ton pèlerinage sur le Camino francés ne fut pas sans encombres…

Je souffrais tellement que j’ai du soulager mes chevilles avec des béquilles. A 25 kilomètres de l’arrivée, le médecin m’a dit que le Chemin était fini pour moi. Je lui répondis avec force : “Je serai à Santiago demain, sur les coudes, les genoux, en rampant, mais j’y serai !”. Curieusement, vingt-quatre heures après mon arrivée, je n’avais plus besoin de béquilles pour marcher !

Dans le jardin du gîte de Véronique "La Halte Pèlerine" à Lectoure. ©Pier Luigi Campo

Hôtesse de pèlerins. Dans le jardin du gîte de Véronique « La Halte Pèlerine » à Lectoure.
©Pier Luigi Campo

En quoi cette seconde expérience du Chemin fut-elle décisive ? 

Une phrase scandait ma marche : “Et toi, qu’as tu fait pour toi ?” Si je regardais en arrière, j’avais vécu plus pour mes proches que pour moi-même. A Fisterra, je m’émerveillai face à cet horizon à perte de vue… notre vie, notre avenir, là tout près, là devant… ce que l’on veut en faire et que l’on découvre…Je retrouvais ma terre bretonne. Ce n’était pas la fin du voyage : des fenêtres s’ouvraient mystérieusement sur “un possible”. J’avais “fait” le Chemin, pleuré de fatigue, de questionnements. Et là, je me découvrais des possibilités que le Chemin m’avait accordées. Il ne tenait qu’à moi de changer de vie : j’avais la force mentale et physique pour mener à bien un nouveau projet de vie.

Tu as alors pris une grande décision ?

L’idée me vint de redonner un jour ce que le Chemin m’avait apporté, enseigné. En avril 2006, je suis venue en région Midi Pyrénées, en quête d’un lieu d’accueil à proximité du GR 65. Rien ne me convenait… jusqu’à ce que j’arrive à Lectoure, dans le Gers : une maison près des remparts, un jardin suspendu dominant la Lomagne… C’était Là… La maison venait de me choisir…J’ai quitté travail, amis, famille, vendu l’appartement rennais, investi mes économies dans cette maison pour ouvrir la Halte Pèlerine, gîte et chambres d’hôtes pour pèlerins, fin juillet 2006.

Que t’apporte cette nouvelle vie d’hôtesse de pèlerins ?

J’ai reçu en 7 ans près de 10 000 pèlerins avec un grand bonheur, chaque jour renouvelé. J’ai bien de la chance…d’avoir osé. Les chemins de Saint Jacques m’ont apporté un autre regard sur le Monde… de la compassion…une qualité d’écoute que j’affûte au fil des rencontres… de la disponibilité… J’en vis petitement mais j’ai tellement gagné en qualité de vie…

As-tu quelques histoires de pèlerins accueillis à la Halte Pèlerine à nous raconter?

Oh oui. Par exemple Donal, pèlerin irlandais de 72 ans, magnifique et merveilleux… avec une sciatique fulgurante. Je l’ai gardé huit jours à la maison. Pour finir, j’ai du organiser son rapatriement sanitaire. Nous sommes restés en contact. Il est revenu pour reprendre le Chemin où il l’avait arrêté. Il m’appelle « mon ange du Chemin ». Je pense aussi à Chloé, jeune pèlerine Suisse qui revenait de Santiago. Elle avait dormi quelques nuits à la belle étoile dans de mauvaises conditions météo. Je l’ai gardé quatre jours sous mon aile, le temps qu’elle reprenne des forces et qu’elle puisse s’envoler à nouveau.

Tu es une vraie mère poule pour les pèlerins en somme ?

Moi qui étais très silex dans mon ancienne vie, je me découvre galet, toute en émotion de ces rencontres où chacun à quelque chose à m’apprendre, à m’apporter.. Chacune de ces rencontres est une des petites pierres que je mets dans mon édifice… Si j’avais le choix…. je ne saurais revenir en arrière !

Bisou d'adieu d'un matin pèlerin devant la Halte Pèlerine de Lectoure. © Pier Luigi Campo

Hôtesse de pèlerins. Plus qu’un métier, une vocation. Bisou d’adieu d’un matin pèlerin devant la Halte Pèlerine de Lectoure. © Pier Luigi Campo

Merci à Pier Luigi Campo, compagnon de pèlerinage de Véronique, pour les droits d’utilisation de ses photos. Propos recueillis par Fabienne Bodan (56) 

Note du 8 mars 2017 : Véronique continue à recevoir plusieurs appels de pèlerins par jour pour réserver un lit ou une chambre. Elle a pris sa retraite le 1er décembre 2016 et invite les pèlerins à prendre contact avec les auberges et chambres d’hôtes vers lesquelles elle avait l’habitude de renvoyer les pèlerins quand elle affichait complet.

 Gîtes (en dortoir uniquement) :
Le Presbytère : 05 62 68 83 83
L’Etoile Occitane : 05 62 68 82 93

Gîtes (avec dortoir et chambres d’hôtes) : 
A deux pas : 05 62 28 99 67
Le Boudoir : 06 75 90 32 81

Chambres d’hôtes ou chambres d’hôtes partagées :
Le Clos : 05 62 68 49 58

Portraits de pèlerins dans Globe-Trotters Magazine

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle. Ils sont parus dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l'association ABM (Aventures du Bout du Monde).

Couverture du N°150 de Globe-Trotters Magazine, édité par l’association ABM (Aventures du Bout du Monde).

Portraits de pèlerins : Jan, Véronique, Richard et Vincent, Roxane sur les chemins

Je vais donc publier cette semaine sur ce blog la version longue de ces interviews, celles-ci ayant du être coupées en raison des contraintes rédactionnelles du magazine. Merci encore à Odile Paugam d’ABM pour cette belle collaboration dans un esprit de respect mutuel et de sérénité/ Merci également au comité de rédaction de l’association pour avoir accepté de publier mes articles sur ces beaux chemins de Compostelle. Première interview…demain…

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Vous pourrez lire également dans ce numéro 150 de GT Magazine l’article d’Aurélie Mandon  narrant son parcours entre Tours et Châtellerault sur la via Turonencis, ainsi que celui de Jean  Revertégat sur son chemin du Puy-en-Velay à Santiago de Compostelle.

Certains lecteurs de ce blog et de ma page Facebook m’ont demandé où l’on pouvait se procurer Globe Trotters Magazine. Il est téléchargeable en format PDF sur le site d’ABM (c’est ici). Vous pouvez aussi acheter un ou plusieurs numéros sur le site d’ABM (c’est par là)

Où trouver Globe Trotters Magazine ?

Enfin, le magazine est distribué dans les librairies suivantes :                                     Librairie Goulard – 37, cours Mirabeau – 13 100 Aix-en-Provence – T : 04 42 27 66 47 Planète bleue – 54, rue Saint Nicolas – 17 000 La Rochelle – T : 05 46 34 23 23         Librairie Molllat – 89, rue Porte Dijeaux – 33 080 Bordeaux – T : 05 56 56 40 40         Librairie des Cinq Continents – 20, rue Jacques Coeur – 34 000 Montpellier –                     T : 04 67 66 46 70                                                                                                          Librairie Ariane – 20, rue Cap. Alfred Dreyfus – 35 000 Rennes – T : 02 99 79 68 47       MTA Géothèque – 10, place du Pilori – 44 000 Nantes – T : 02 40 47 40 68              Itinérances – 62, rue Baudrière – 49 100 Angers – T : T : 02 41 77 36 47                        Autour du Monde – 65, rue de Paris – 59 026 Lille Cedex – T : 03 20 78 19 33             Raconte moi la terre – 14, rue du Plat – 69 002 Lyon – T : 04 78 92 60 22                     Chemin en pages – 121, av. Ledru Rollin – 75 011 Paris – T : 01 43 38 15 77                 Gibert Joseph – 26, bd Saint Michel – 75 006 Paris – T : 01 46 46 10 50                          ABM – 11, rue de Coulmiers – 75 014 Paris

ABM organise deux festivals de voyages par an : Partir Autrement en avril, et le Festival des Globe-Trotters en septembre. Pour plus d’informations sur les activités et le fonctionnement de l’association, consultez leur site web à l’adresse http://www.abm.fr.

Affiche de la 25e édition du Festival des Globe-Trotters organisé par ABM à l'Opéra de Massy. Une soirée (le vendredi) et deux journées complètes de projections, stands et conférences de voyageurs.

Affiche de la 25e édition du Festival des Globe-Trotters organisé par ABM à l’Opéra de Massy. Une soirée (le vendredi) et deux journées complètes de projections, stands et conférences de voyageurs.