Camino sin limites : quand l’amour fraternel défie l’improbable !

Camino sin limites : un amour fraternel incommensurable

Camino sin limites

Oliver et Juan Luis Marfil, du projet Camino sin limites. Capture d’écran sur leur site internet.

L’un s’appelle Oliver. L’autre Juan Luis. Ils sont frères. Espagnols. De Granada. Ils ont parcouru en septembre dernier les 800 kilomètres qui séparent Roncevaux de Saint-jacques de Compostelle. Jusque là, rien d’exceptionnel, me direz-vous ? Sauf que le plus jeune des frères, Juan Luis, est handicapé à 96%. Il n’est autonome ni pour se déplacer, ni pour s’alimenter, ni pour un quelconque acte de la vie quotidienne. Il ne se déplace qu’en fauteuil roulant, poussé par quelqu’un d’autre. Les deux frères ont vécu une aventure épique qui les marquera jusqu’à la fin de leur vie.

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11500 km à pied sur le Trans Canada Trail

Trans Canada Trail : 25 ans, 11500 kilomètres à pied !

RandonnéeSarah Jacjson a 25 ans. Elle s’est lancée, en juin 2015, dans un projet peu commun : le Trans Canada Trail. 11500 kilomètres au total. Ce chemin de randonnée est le plus long au monde. Elle est la première femme à parcourir cet itinéraire depuis Victoria (Colombie Britannique) jusqu’à St John’s (Terre-Neuve et Labrador). Il lui reste encore 2700 kilomètres à cheminer.

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Le Noël des Pèlerins au long cours

Je vous souhaite un Joyeux Noël à tous, mes chers lecteurs, et vous remercie de suivre Joyeux Noëlmes publications. J’avais envie, pour cette journée de fête en famille, de mettre en lumière les aventures des pèlerins au long cours. Trois d’entre eux (à ma connaissance) cheminent toujours en cette fin d’année. Un quatrième vient de terminer un périple de plus de 5000 kilomètres. Alors j’ai une pensée spéciale pour eux en ce jour de Noël. Je leur souhaite de savourer chaque instant, chaque rencontre, chaque sensation de leur merveilleuse aventure. Et je m’incline devant leur courage et leur détermination à cheminer à une période de l’année qui n’est pas des plus clémentes. Continuer la lecture

Compostelle le livre des Merveilles

Bonjour et Joyeux Noël à tous,

Je profite de ce 24 décembre pour publier, avec l’accord des auteurs, les pages du Livre des Merveilles de Patrick Huchet (pour les textes) et Yvon Boëlle (pour les photographies) . Les auteurs parlent de mon expérience compostellane. Voici leurs bibliographies, extraites de leur dernier ouvrage.

Mon aventure sur les chemins dans Compostelle le livre des Merveilles 

Merci à Yvon Boëlle pour les photos de la couverture du livre et des pages me concernant!

Couverture de l'ouvrage de l'écrivain Patrick Huchet et du photographe Yvon Boëlle "Compostelle, le livre des Merveilles", paru aux éditions Ouest France en octobre 2014.

Couverture de l’ouvrage de l’écrivain Patrick Huchet et du photographe Yvon Boëlle « Compostelle le livre des Merveilles », paru aux éditions Ouest France en octobre 2014.

L’historien et le photographe

Patrick Huchet a suivi des études d’histoire avant de se tourner vers la recherche historique et l’écriture. Patrick est passionné d’art roman, amoureux des grands espaces et des paysages de montagne. Il sillonne les voies pèlerines de France et d’Espagne depuis 1996. Devenue une référence pour les pèlerins de Saint-Jacques, il est l’auteur de nombreux ouvrages publiés aux Editions Ouest-France. Parmi ces ouvrages, on note Sur les chemins de Compostelle, Sur les nouveaux chemins de Compostelle et Les templiers, une fabuleuse épopée. 

1996. Le photographe Yvon Boëlle s’élance sur les chemins de Compostelle au départ du Puy-en-Velay. Vingt ans plus tard, il les arpente encore. Cet ouvrage devrait être le point final à ces épopées, mais qui sait ? Photographe par passion, il ne cesse de parcourir les routes de l’Arc Atlantique. De la Galice à l’Ecosse, en revenant au pays qui l’a vu naître, la Bretagne. De nombreux ouvrages et magazines en sont le témoignage. Voir son site : http://www.yvon-boelle.com

Compostelle le livre des Merveilles : un grand MERCI à tous les deux !

Il est encore temps de foncer chez votre libraire pour pouvoir déposer ce livre au pied du sapin. 29,90 euros aux Editions Ouest France.

"Compostelle, le livre des Merveilles", page 122 & 123, dans le chapitre "Eloge de la marche sur les chemins de Saint Jacques.

« Compostelle le livre des Merveilles », page 122 & 123, dans le chapitre « Eloge de la marche sur les chemins de Saint Jacques.

"Compostelle, le livre des Merveilles", page 115, dans le chapitre "La vie quotidienne sur les chemins : une marche ouverte à l'émerveillement". Avec mes amis Gino le Suisse et Michel le Breton, devant le mythique Méson Cowboy, entre Astorga et Rabanal del Camino (Camino francés).

« Compostelle le livre des Merveilles », page 115, dans le chapitre « La vie quotidienne sur les chemins : une marche ouverte à l’émerveillement ». Avec mes amis Gino le Suisse et Michel le Breton, devant le mythique Méson Cowboy, entre Astorga et Rabanal del Camino (Camino francés).

 "Compostelle, le livre des Merveilles", page 156. Remerciements et Biographies.

« Compostelle le livre des Merveilles », page 156. Remerciements et Biographies.

"Compostelle, le livre des Merveilles", 4e de couverture. "De la naissance du pèlerinage à Santiago, au IXe siècle, à celui de son renouveau, au XXe siècle...Des splendeurs romanes de la chapelle Saint-Michel d'Aiguilhe aux trésors baroques de la cathédrale de Lugo...Des rares photos de jacquets de 1948 et 1958 aux témoignages émouvants, vrais, de pèlerines et pèlerins d'aujourd'hui...De l'art de composer son sac à dos à celui de réussir cette délicieuse Tarta de Santiago...

« Compostelle le livre des Merveilles », 4e de couverture. « De la naissance du pèlerinage à Santiago, au IXe siècle, à celui de son renouveau, au XXe siècle. Des splendeurs romanes de la chapelle Saint-Michel d’Aiguilhe aux trésors baroques de la cathédrale de Lugo. Des rares photos de jacquets de 1948 et 1958 aux témoignages émouvants, vrais, de pèlerines et pèlerins d’aujourd’hui. De l’art de composer son sac à dos à celui de réussir cette délicieuse Tarta de Santiago…

Richard et Vincent, père et fils sur le Camino

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Père et fils sur le Camino. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Père et fils sur le Camino à l’unisson

Ils cheminent à l’unisson. Tantôt l’un, tantôt l’autre ouvre la marche. Ils sont équipés de sacs à dos, capes de pluie, sacs de couchage identiques. Ils ne se quittent jamais, s’adaptent au rythme de l’autre, soutiennent l’exercice physique et moral de l’autre, décident, ensemble, sereinement, de leur étape du lendemain le soir à la veillée. Complices, Richard, 70 ans, et Vincent, 40 ans, père et fils, se sont immergés dans l’aventure compostellane en deux grandes étapes : du Puy-en-Velais à Roncevaux en octobre 2011, de Roncevaux à Santiago de Compostelle en octobre 2012.

Globe-Trotters Magazine : Lequel d’entre vous a eu cette idée ?

Vincent : Moi. Je voulais entreprendre quelque chose. Je le sentais, sans trop savoir quoi, ni pourquoi. J’ai vu un reportage sur Compostelle. Et là, je me suis dit : “c’est ça que je veux faire”.

Richard : Vincent nous a exposé son projet. Il n’avait pas envie de partir seul. Alors ma femme m’a dit : “pourquoi ne partirais-tu pas avec ton fils ?”. Et voilà comment, à mon âge, malgré mes douleurs au dos et aux genoux, je me suis lancé dans cette folle aventure.

Col de San Roque, entre O Cebreiro et Triacastela (Camino francés), ou le début d'une journée pluvieuse qui verra Richard et Vincent arriver trempés jusqu'aux os et aux bout des orteils au gîte de l'étape. © Fabienne Bodan

Père et fils sur le Camino. Col de San Roque, entre O Cebreiro et Triacastela (Camino francés), ou le début d’une journée pluvieuse qui verra Richard et Vincent arriver trempés jusqu’aux os et aux bout des orteils au gîte de l’étape. © Fabienne Bodan

Votre complicité est émouvante. Marcher ensemble vous a permis d’aller jusqu’au bout ?

Richard : L’an dernier, mon genou s’est bloqué. Heureusement qu’un soir, dans un gîte, j’ai rencontré un kinésithérapeute qui me l’a remis en place. Je ne pouvais pas arrêter, car Vincent aurait dû faire de même. Je n’avais pas le droit de compromettre son projet. Soit nous parvenions ensemble à destination, soit nous arrêtions tous les deux.

Vincent : L’an dernier, mon père s’est blessé. Cette année, c’est moi, avec cette tendinite qui a bien failli m’empêcher d’arriver à Santiago. A mon tour, je ne pouvais pas renoncer, ni pour moi, ni pour lui. Pas si près du but.

Que retirez-vous de ce voyage ?

Richard, Vincent : Pour nous, il s’agissait d’un défi physique. Une randonnée au long cours pour aller jusqu’au bout de nous-mêmes. En rentrant, nous avons attaqué Roanne-Thiers, une marche de 57 kilomètres dont la première édition a eu lieu en 1925. Le départ a lieu à minuit, il faut arriver avant midi. Avec nos 800 kilomètres du Camino francés, nous étions entraînés !

La cathédrale de Saint Jacques de Compostelle n'est plus qu'à 4 kilomètres. Mais Richard et Vincent savourent déjà la joie inénarrable de l'arrivée ! © Fabienne Bodan

Père et fils sur le Camino. La cathédrale de Saint Jacques de Compostelle n’est plus qu’à 4 kilomètres. Mais Richard et Vincent savourent déjà la joie inénarrable de l’arrivée ! © Fabienne Bodan

Propos recueillis par Fabienne Bodan 

Pèlerine du Québec : Roxane et l’attrapeur de rêves

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM (Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

Pèlerine du Québec. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 2.

4 septembre 2012. Roxane, jeune québécoise de 24 ans, entame son périple compostellan. Elle a accroché à son sac à dos, un “capteur de rêves” et une multitude de petits flacons.

Globe-Trotters Magazine : Comment t’est venue l’idée de partir sur les Chemins de Compostelle ?

Roxane Bellerose-Morin : Je revenais de quinze mois en Océanie et Asie du sud-est où j’avais passé le plus clair de mon temps dans une tente et sur la route, à simplement m’amuser et vivre. Ma perception de la réalité québécoise avait complètement changé et mes relations humaines se détérioraient de jour en jour. Je faisais du bénévolat pour compenser ce mal de vivre dans cette société. C’est alors qu’une amie m’a demandé quel serait mon prochain voyage. J’ai répondu sans vraiment réfléchir que les Chemins de Compostelle m’avaient toujours intriguée : l’appel de la nature, la simplicité du style de vie…

Ce sac à dos m'intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l'attrapeur de rêves ? © Fabienne Bodan

Pèlerine du Québec. Ce sac à dos m’intriguait depuis quelques jours. Que pouvait-il bien y avoir dans ces petits flacons ? Et quelle personnalité se cachait derrière l’attrapeur de rêves ?
© Fabienne Bodan

Pourquoi as-tu emporté ce capteur de rêves, toi la pèlerine du Québec ?

J’avais organisé en août une “journée de rêves”. Chacun devait écrire sa plus grande aspiration sur un papier d’une couleur qui le représentait. En accrochant au capteur de rêves des petits flacons contenant ces petits bouts de papier, j’ai emporté tous ces voeux vers Compostelle. C’était purement symbolique : mon but premier était que les personnes réveillent leurs aspirations. Même si leur rêve ne parvenait pas à destination, il resterait toujours dans leurs pensées ! Et pour moi, ça me permettait d’accessoiriser mon sac à dos. Un ami en Espagne m’a donné une plume de paon et une autre de hibou, car toutes mes plumes avaient disparues depuis Toulouse! Le flacon d’une amie s’est échappé au moment même où il se passait un grand changement positif dans sa vie!

A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s'entendit répondre : "Saint Jacques de Compostelle" ! ©Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. A 24 ans, Roxane venait de passer 15 mois en Océanie et en Asie du Sud-Est. A une amie lui demandant quelle serait sa prochaine destination, elle s’entendit répondre : « Saint Jacques de Compostelle » ! ©Roxane Bellerose-Morin

Le Chemin n’a pas été de tout repos pour toi…

J’ai du parfois prendre le bus ou faire du stop pour soulager mes chevilles. Lorsque je suis montée à la Cruz del Ferro (NDLR : l’un des lieux mythiques du Camino francés, où les pèlerins déposent une pierre ou un objet emportés de chez eux, comme pour se délester symboliquement de ce qui ne leur convient plus dans leur vie), j’ai compris plein de choses. Le soir, mes tendinites aux deux chevilles avaient empiré. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange. J’ai rencontré une dame qui m’a fait prendre conscience que “la façon dont je faisais le chemin était identique à la façon de gérer ma vie”.

Marcher à l’envers

Du coup, j’ai eu un flash en m’endormant le soir : refaire un bout du chemin parcouru… à l’envers. Je voulais me faire prendre conscience que dans la vie, il faut passer par des étapes ennuyeuses : lorsqu’on cherche à l’éviter, il se peut que les conséquences soient pires. Marcher à l’envers faisait encore plus de sens parce que ça allait ajouter de la difficulté dans l’expérience. Du coup, je me suis habituée au silence et j’ai apprécié ma compagnie. J’ai réussi à m’écouter. J’ai cessé d’être influencée par les autres. Je n’ai pas atteint ma destination : ma dernière journée de marche a nécessité cinq heures pour…cinq kilomètres. Les tendinites étaient définitivement revenues. J’ai donc pris le train pour Santiago et ensuite l’avion pour Barcelone et Toulouse. Deux jours plus tard, je m’envolais pour Montréal.

Perclue de tendinites, Roxane n'atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Perclue de tendinites, Roxane n’atteindra pas Santiago. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l'est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Mais elle reviendra de son Québec natal, un jour, elle se l’est promis. © Roxane Bellerose-Morin

Envisages-tu, malgré tout, de revenir sur les Chemins de Compostelle ?

Oh oui. En avril 2014 ! Je veux marcher sur la voie d’Arles, et terminer le Camino francés.

Qu’est-ce qui a changé dans ta vie depuis ton retour du Chemin ?

Ma peur bleue des chiens a disparu. En outre, je trouve la Cathédrale de mon village magnifique. Je parle aux étrangers avec une aisance remarquable. Désormais, je comprends l’espagnol. Je ressens le besoin de marcher à l’extérieur chaque jour. J’ai appris comment faire des capteurs de rêves. Enfin, j’ai décidé de faire, une à une, toutes les choses dont je rêve…

Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s'est inscrite dans une école d'arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Pèlerine du Québec. Roxane facétieuse, Roxane artiste. A son retour au Québec, elle s’est inscrite dans une école d’arts à Rivière-du-loup. © Roxane Bellerose-Morin

Propos recueillis par Fabienne Bodan (56)

Jan, le pèlerin d’Anvers

Après la publication de mes premiers articles sur mon chemin de Compostelle 2012 (Via Podiensis et Camino francés) dans le numéro 148 de la revue Globe-Trotters Magazine de l’association ABM(Aventuriers du bout du monde), j’ai proposé au comité de rédaction de l’association une série de portraits de pèlerins de Compostelle dans le cadre du numéro spécial « Sur les Chemins de… » N°150 de juillet-août 2013. 

Après un article intitulé "La magie des chemins de Compostelle" dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Pèlerin d’Anvers. Après un article intitulé « La magie des chemins de Compostelle » dans le numéro 148, Globe-Trotters Magazine publie dans son numéro 150 une série de portraits de pèlerins rencontrés sur la voie du Puy et le Camino Francés en 2012. Page 1.

Je vous ai parlé dans l’article précédent des circonstances de ma rencontre avec Jan, dans l’ascension du col de Roncevaux. Voici, comme promis, l’interview qu’il m’a accordée.

Pèlerin d’Anvers : 2000 kilomètres à pied vers Compostelle

L’idée lui trottait dans la tête depuis sept ans. Il attend la retraite pour concrétiser son projet. Jan a 57 ans. Le flamand d’Anvers s’élance le 2 juillet 2012, du seuil de sa maison, dans un grand périple en solitaire de 2 000 kilomètres vers Saint Jacques de Compostelle. Il s’est entraîné depuis le début de l’année sur 1 400 kilomètres, lestant son sac de bouteilles en plastique remplies de pierres, porte 26 kilos dans son sac à dos, car il a choisi l’autonomie intégrale du camping. Trois mois plus tard, il parvient à destination.

Globe-Trotters Magazine : Qu’est-ce qui t’a donné cette idée ?

Jan : Une émission de télé. Un jeune reporter, caméra sur la tête, effectuait le chemin en hiver. Tous les jours, on montrait pendant une dizaine de minutes les images de son aventure.

“Partir en pèlerinage signifie abandonner pour recevoir et devenir à nouveau un véritable être humain”. En quoi cette phrase t’a-t-elle inspirée dans ta démarche?

Je voulais effectuer une parenthèse dans ma vie pour faire le point. Non sur papier mais dans mon esprit. J’ai eu le privilège d’avoir une famille formidable, une femme douce et délicate, des enfants ayant trouvé leurs voies respectives, une bonne santé, un métier qui me plaisait et la liberté, au sein de ma famille, de m’exprimer et de demeurer moi-même. Je me sentais privilégié, heureux. Je souhaitais m’imprégner profondément de cette sensation, remercier la vie pour ce qu’elle m’avait offert. Un peu comme un contrepoids à l’injustice, la misère et le chagrin de nombre de personnes sur la terre. Santiago représentait la destination mais certainement pas le but du voyage. Non, le but ultime consistait en cette longue route qui me permettrait la rencontre avec…moi-même.

Comment as-tu associé les tiens à cette aventure ?

J’ai dédié ce pèlerinage à ma famille, ma femme et mes enfants, mes amis, par gratitude pour l’affection et la joie qu’ils m’ont données. Chaque jour, je marchais pour une personne en particulier. Ainsi, j’ai consacré l’étape la plus difficile de mon parcours, l’ascension du col de Roncevaux, à ma soeur accidentée. Une autre chose me tenait à coeur : je voulais me libérer de cette petite colère qui tourmentait mon âme, parce que j’ai déçu des gens dans ma vie, et que mon incapacité à transformer cette déception provoquait cette colère. Alors j’espérais que ce chemin ouvrirait ces coeurs pétrifiés et qu’ils m’accorderaient leur pardon.

Comment vois-tu la vie désormais, toi le « pèlerin d’Anvers » ?

Je ne crois pas que cette expérience ait fondamentalement changé ma vie. Cependant, j’ai pris conscience de ma propre valeur, et je n’ai plus besoin de reconnaissance. Cela me met à l’abri des flatteries de personnes peu sincères. J’ai appris que le hasard n’existe pas, qu’une solution se présente toujours lorsque l’on se sent en péril, que les gens que l’on rencontre et apprécie sont toujours plus ou moins un miroir de soi-même, de même que ce qui nous irrite chez les autres. J’ai compris également que relativiser est la meilleure manière d’être heureux.

Propos recueillis par Fabienne Bodan (56)